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Nanofluides, l’efficacité à la hausse – Page 8

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Nanofluides, l’efficacité à la hausse – Page 8/8Rédigé par David D. – 14/11/2008
Catégorie : Watercooling

« Page précédente 1 – Comment améliorer encore plus l’efficacité d’un refroidissement liquide ?2 – Nanofluide, késako ?3 – Évolution du concept : « size does matter »4 – Amélioration de deux paramètres de base5 – Lutte contre la couche limite dynamique6 – Quels phénomènes principaux sont candidats pour expliquer ces améliorations ?7 – Que donne un nanofluide dans une application réelle ?8 – Bilan sur l’intérêt d’un nanofluide  
Bilan sur l’intérêt d’un nanofluide

Du point de vue des performances thermiques

Il est indéniable qu’un bon nanofluide apporte un coup de pouce à l’efficacité d’un système de refroidissement liquide quelconque sans avoir plus de bruit et sans consommer plus. Au contraire, l’efficacité générale étant améliorée, on peut penser à réduire la ventilation ou à prendre une pompe moins puissante, tout en gardant un niveau de performance identique si le silence de fonctionnement est la priorité.

Cela intéresse bien sûr l’industrie au sens large (moteur thermique, climatisation, composant de puissance, installation nucléaire, accélérateur de particules, domaine aéronautique ou spatial, etc.), car ça permet de réduire la taille des équipements de refroidissement ou leur consommation électrique puisqu’on gagne en efficacité sans trop se fatiguer. Les systèmes dissipant de grosses quantités de chaleur ou générant des densités de flux thermique très importantes (>250-500 W/cm2) vont vite y trouver leur compte. On estime en effet que pour doubler le coefficient d’échange, il faut multiplier la puissance de pompage par 10, ce qui est énorme et non rentable. Un nanofluide permet de s’en affranchir partiellement en améliorant ce coefficient jusqu’à 80 % en régime turbulent sans modifier la puissance nécessaire au fonctionnement.

Toutefois, même si c’est mieux que notre référence, à savoir l’eau pure, un nanofluide n’est pas non plus un fluide miraculeux qui va tout révolutionner, car ses propriétés thermophysiques restent somme toute assez limitées. Même si l’échange thermique dans le waterblock était parfait avec une résistance thermique de convection nulle (le palier vers lequel on tend quand on augmente le débit), il resterait quand même tous les autres facteurs limitants de la chaine de transfert thermique décrite au début du dossier… On ne peut pas les améliorer énormément, ni indéfiniment, il ne faut pas rêver. Les niveaux actuels de performance sont déjà élevés et peu enclins à s’améliorer sans augmenter toujours plus les débits d’eau et surtout d’air.

Plus le système sera chargé (Quadcore, SLI, Crossfire), meilleurs seront les gains par rapport à l’eau, car on cumulera des améliorations partout. Utiliser un nanofluide avec une toute petite configuration n’apportera pas grand-chose, si ce n’est un surcoût probable (bien que certains soient capables d’acheter des fluides diélectriques ou bling-bling à plus de 20-30 euros le litre pour des performances un peu moins bonnes…). Le test avec l’un des nanofluides utilisés par le CEA a montré des améliorations sensibles, mais il faudrait poursuivre l’étude pour avoir une vision plus globale et voir qui, du waterblock ou du radiateur, en bénéficie le plus suivant diverses conditions par exemple.

Bien au niveau thermique, mais les inconvénients et les prix ?

On a vu que l’érosion des surfaces et la sédimentation sont des effets que l’on peut négliger avec un nanofluide. La corrosion reste un point à vérifier, mais si on le choisit bien en prenant quelque chose d’inerte ou en l’adaptant à son circuit, alors il n’y aura aucun souci. On peut également penser à la conductivité électrique qui là aussi dépendra notamment de la nature du matériau employé, mais ce n’est pas un réel problème dans un circuit correctement conçu. Les fuites sont tout de même rarissimes, même si certains fabricants surfent sur cette peur pour faire vendre leur fluide à prix d’or, qui souvent n’ont rien de diélectrique…

La disponibilité et le choix de nanofluides directement prêts à l’emploi pour nous sont pour l’instant extrêmement restreints a priori et c’est un domaine où la recherche a encore une place importante. Quelques firmes, comme Nanophase Technologies par exemple, utilisent des procédés en deux étapes pour avoir du volume de production afin de vendre des suspensions concentrées à haute pureté. Néanmoins, les tarifs de ces nanofluides, que nous avons eus en les contactant, sont d’environ 100 à 200 $ pour 1 kg de nanofluide d’alumine Ø45 nm à 50 % de concentration en masse pour une commande de plus de 20 kg. Il faudrait ensuite les diluer pour atteindre une concentration bien plus faible, mais la qualité peut être variable à cause des agglomérations, c’est impossible à déterminer sans matériel. Selon le chercheur, le coût de production du nanofluide du CEA ne serait que de quelques euros le litre…

Par contre, on trouve quasiment toutes les nanopoudres sèches que l’on veut, même si les firmes n’en vendent normalement pas aux particuliers (risques d’utilisation par exemple). Les ordres de grandeur des tarifs font aussi un peu réfléchir, même si c’est plus rentable qu’une suspension concentrée, mais il faut en prendre au moins un kilogramme pour avoir des prix plus intéressants, sinon ce n’est pas la peine. Pour un litre de nanofluide à 5 %, il nous faut entre 10 et 50 grammes environ de nanopoudre selon le matériau et les dimensions des nanoparticules.

Tarifs de diverses nanopoudres relevées chez NanoAmor
Matériau utilisé Diamètre moyen Tarif en petite quantité Tarif pour un kilo acheté directement
Oxyde de zinc 20 nm 70 $ pour 100 g (soit 700 $/kg) 160 $
Oxyde d’aluminium 25 nm 80 $ pour 100 g (soit 800 $/kg) 210 $
Cuivre 25 nm 110 $ pour 25 g (soit 4400 $/kg) 2254 $
Diamant synthétique 6 nm 245 $ pour 25 g (soit 9800 $/kg) 5500 $
Argent 10 nm 533 $ pour 25 g (soit 21 320 $/kg) 7253 $
Or 35 nm 4941 $ pour 25 g (soit 197 640 $/kg)
Nanotubes de carbone à simple paroi 1-2 nm 350 $ pour 1 g (soit 350 000 $/kg)

Les nanoparticules à base d’oxydes sont de loin les plus accessibles, mais ce ne sont pas les plus performantes. En s’y mettant à quelques dizaines de personnes pour prendre une quantité suffisante et se la partager, on peut se faire un litre de nanofluide à base d’oxydes métalliques pour 3 à 7 € environ, ce qui reste raisonnable. Néanmoins, sa qualité ne sera probablement pas exceptionnelle si l’on ne dispose pas d’un moyen d’homogénéiser la solution après le mélange de la nanopoudre, notamment grâce à des ultrasons. L’utilisation de nanoparticules de métaux purs sera dix à cent fois plus coûteuse, donc très peu intéressante ici.

Le dernier point concerne les aspects toxicologiques et là il y a un manque de recul certain sur les dangers des nanoparticules pour l’environnement et la santé. Diverses études sont en cours pour déterminer leurs effets, car on ne manipule pas de la nanopoudre n’importe comment. C’est tellement fin que ça vole et pénètre profondément partout (voies respiratoires) et il faut des mesures spécifiques de filtration et de confinement. Dans un nanofluide, les nanoparticules sont piégées dans le liquide donc il n’y a pas de souci, mais il est a priori préférable de ne pas en renverser sur soi sans porter de gants, car il a été démontré qu’elles traversent la barrière cutanée sans grande difficulté. Suivant leur nature et leur concentration, ces corps étrangers pourraient mener à des maladies du type cancer à force de les manipuler (bien qu’on en respire déjà un peu tous les jours avec certains types de pollution). Sur ce point-là, c’est le flou artistique, donc mieux vaut être prudent pendant son utilisation…

Par delà le watercooling…

L’attrait pour les nanofluides ne s’arrête pas au watercooling basique. Les systèmes à changement de phase du type caloduc ou thermosiphon diphasique peuvent aussi en bénéficier et exploiter leurs particularités. La présence de nanoparticules permet de retarder ce qu’on appelle la « crise d’ébullition » en améliorant de façon significative la valeur du flux de chaleur critique. Ce dernier survient au moment où la surface chaude arbore une densité de flux thermique suffisante (quelques dizaines de watts/cm2, ce qui est peu) pour se retrouver complètement recouverte d’un film gazeux et non plus de bulles indépendantes, c’est la caléfaction. Ça a le gros inconvénient d’isoler littéralement la paroi chaude du fluide, comme un assèchement, et donc de faire chuter brutalement l’efficacité avec une hausse rapide de la température du système. Cette amélioration du flux critique est attribuée à la présence de nanoparticules sur la surface. Cela améliore la mouillabilité et fournit d’innombrables sites de nucléation, ce qui favorise la naissance et le développement des bulles, exactement comme avec des surfaces microstructurées conçues exclusivement pour ça. Il n’y a rien de plus mauvais qu’une surface polie et bien lisse pour du changement de phase.

Certains types de caloducs remplis avec quelques gouttes de nanofluide à l’argent peuvent voir leur résistance thermique diminuée de 30 à 40 % grâce à une meilleure nucléation des bulles notamment. D’autres expériences montrent des améliorations du flux critique de plus de 200 % avec d’infimes concentrations de nanoparticules (0,0001 à 0,001 %), mais s’accompagnent dans certains cas d’une petite chute du coefficient d’échange à la paroi vraisemblablement à cause du dépôt de particules sur la surface (effet à double tranchant). On gagne d’un côté, mais on peut éventuellement perdre de l’autre. Il faut donc trouver le bon compromis suivant l’application, pas si simple…

Vous pouvez réagir à ce dossier et poser vos questions sur le forum.

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